
Kieran Tierney, l’homme qui tire sur l’ambulance
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Au terme d’un match épique (4-2), l’Écosse a terrassé le Danemark pour obtenir son ticket pour l’Amérique et la Coupe du monde 2026. Dans une soirée ayant eu son lot de buts exceptionnels, c’est Kieran Tierney qui délivrera toute une nation dans les arrêts de jeu. Une belle récompense, histoire de se dire que ces années de détresse n’ont pas été en vain.
La Coupe du monde à 48 équipes va-t-elle devenir un plébiscit outre-Manche ? Dimanche 17 novembre, l’Irlande faisait plier la Hongrie dans un match rocambolesque, pour valider une place dans des barrages promettant d’être tout aussi épiques. Déjà auteur d’un doublé contre le Portugal, Troy Parrott rentrait dans la légende en posant un triplé sur la pelouse du Ferenc-Puskás. Un moment d’illumination, qui risque bien d’être éclipsé par ce qui a été vécu deux jours plus tard. Dans un Hampden Park bouillonnant, l’Écosse devait défaire le Danemark pour réaliser l’impensable : se qualifier au Mondial pour la première fois depuis 1998. L’ultime preuve du retour en force de la Tartan Army. Très vite, on a ressenti que la rencontre pouvait basculer dans l’irrationnel, lorsque Scott McTominay réussissait un ciseau d’une grande classe dès la 3ᵉ minute de jeu.
Tiernay fait exulter Hampden Park à la 93e minute ! L’Écosse est à 2 minutes de la Coupe du monde, quelle ambiance en Écosse pic.twitter.com/7uYXcUgogP
— la chaine L’Équipe (@lachainelequipe) November 18, 2025
Les Dynamites danoises montrent une énorme résilience, égalisant par deux fois après l’expulsion très généreuse de Rasmus Kristensen. Mais cette nuit était faite pour que la croix de Saint-André flotte dans le ciel. Remplaçant Aaron Hickey sur le côté droit, Kieran Tierney est là, pour apporter un bon ballon dans un match devenu un simple attaque-défense. C’est alors que dans les arrêts de jeu, après un interminable enchaînement de cafouillages, l’ancien golden boy du Celtic arme son pied gauche pour délivrer une merveille terminant dans le petit filet de son coéquipier en club, Kasper Schmeichel. Kenny McLean corsera l’addition en lobant le portier de plus de cinquante mètres. Une délivrance, pour celui qui souffre de sa passion au quotidien.
Panique celtique à l’infirmerie
Originaire de l’Île de Man, qui a vu naître Mark Cavendish ou les Bee Gees, le petit Kieran va très vite se montrer à son aise avec un ballon. Au point de faire sa première apparition sous le maillot du Celtic à dix-sept ans, mais aussi de piquer la place d’Emilio Izaguirre, chouchou du Celtic Park sur le flanc gauche. Sa qualité technique très supérieure à la moyenne et sa maturité vont faire de lui un des plus grands talents européens. Avec 140 matchs dans le moteur à seulement vingt ans, le latéral va être nommé capitaine, à l’aube de la saison 2017-2018. Le plus jeune de l’histoire des Bhoys. Son côté simple lui permet aussi de gagner en popularité auprès du grand public. Notamment lorsque l’on pointe le fait qu’il trimballe régulièrement ses crampons dans un sac en plastique Tesco (plus grande chaîne de supermarchés en Grande-Bretagne, NDLR), habitude qu’il a depuis petit.
Mais comme tant d’autres, Kieran Tierney n’arrivera jamais à se débarrasser des pépins physiques. Déjà nombreux lors de ses jeunes années, ils se propagent sur l’ensemble de son corps. Entre autres, une déchirure du ligament de la cheville, une hanche en vrac, ou même une double hernie au moment de poser son sac plastique à Arsenal. Face à la pression d’assurer pour son club de toujours, le capitaine prend des antidouleurs dès l’âge de vingt ans. Comme il le déclarait dans un podcast : « À chaque match, je prenais plusieurs injections. Certaines étaient des antidouleurs, d’autres étaient des stéroïdes. En 2019, j’avais même une ostéite pubienne : une douleur chronique qui enflamme l’abdomen et le pelvis. Mon coéquipier de l’époque, Tom Rogić, m’a traité d’idiot quand il a su que je jouais dans ces conditions. » Quand il y a des jours où tu n’es pas capable de te lever, il faut peut-être lever le pied.
Une arme en moins dans l’Arsenal
Malheureusement, son corps s’en chargera à sa place, et au pire timing possible. Arrivé en 2019 dans le but d’être un des piliers de Mikel Arteta, le néo-Gunner ne pourra pas profiter du renouveau d’Arsenal. Et ce dès l’hiver, lorsqu’en dix minutes, le numéro 3 disloque trois fois son épaule dans un match contre West Ham. Si les deux saisons suivantes se déroulent sans encombre, une blessure au genou fauchera son élan au printemps 2022. Le conte de fées prendra fin ici, dès que son coach ira débusquer Olexandr Zinchenko pour le faire jouer côté gauche. C’était la blessure de trop. Celle qui le meurtrit, aussi bien physiquement, que mentalement. Nombre de supporters le sentent au fond du trou. Et si une pige à la Real Sociedad lui permet de reprendre espoir, c’est pour mieux se blesser au genou en plein Euro 2024, sorti sur civière contre la Suisse.
À chaque match, je prenais plusieurs injections. J’avais même une douleur chronique qui enflamme l’abdomen et le pelvis. Tom Rogić, m’a traité d’idiot quand il a su que je jouais dans ces conditions.
Kieran Tierney
Après avoir manqué plus de 150 matchs sur blessure, le Mannois s’offre un retour aux sources, à Glasgow. Il n’est pas le seul à être brusqué intérieurement, rejoignant un club en perte de repères, qui sera éliminé en barrages de Ligue des champions par le Kairat Almaty. Au point que Loïs Guzukian, amoureux du football écossais sur Twitter, soit alerte sur son cas : « Le niveau horrible du Celtic ne l’aide vraiment pas, mais au vu de son début de saison, je pense que Tierney a perdu en niveau. Ses blessures, aussi bien physiques que mentales, l’ont véritablement amené à un certain déclin. » Si le Celtic Park reste dans l’attente d’un nouveau gourou après le renvoi de Brendan Rodgers, gageons que cette nuit magique puisse être celle d’un nouveau départ pour celui censé être le fer de lance de la nation gaélique.
