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Tout semblait ficelé pour permettre au FC Nantes de se relancer en championnat pour retrouver l’élite du football français. Lors du dernier jour du mercato hivernal de 2012, un panic buy viendra ravir les supporters Nantais. Ismaël Bangoura, attaquant guinéen, décide de revenir en France après une pige ratée à Al-Nasr. Pour autant, ce transfert s’avérera comme étant le panic buy le plus folklorique du football français.
Une résiliation de contrat contestée
Beaucoup de suiveurs du football connaissent le panic buy. Popularisé en Angleterre par la folie des grandeurs lors du dernier jour du mercato, avec Chelsea en figure de proue du genre (Torres, Cuadrado, Djilobodji pour ne citer que), ce terme est arrivé sur le continent. En France, plusieurs histoires sont ressassées tous les ans (Mitroglou, Everton, Souza, etc.) mais au vu des conséquences sportives et extrasportives, le transfert d’Ismaël Bangoura est une leçon de gestion de football.
Mécontent de son temps de jeu aux Emirats avec un petit match au compteur, Ismaël Bangoura a l’opportunité de revenir en France. En effet, le FC Nantes, désireux de revenir rapidement sur le devant de la scène en France, propose au joueur de casser son contrat et venir jouer dans la capitale du Pays de la Loire. C’est alors que durant la journée du 31 janvier 2012, l’international guinéen brandit un maillot Canari. Au départ considéré comme un contrat résilié, les choses vont prendre une toute autre tournure.
Estimé lésé par ce mouvement, le club d’Al-Nasr dépose un recours auprès de la FIFA. Les émiratis estiment que le contrat n’a pas été résilié et le joueur appartient toujours au club. Bangoura, lui, reprend la saison à la Beaujoire avec la certitude du contraire, tout comme les dirigeants nantais.
Des premiers questionnements financiers et une affaire d’allocations chômages
Un début de carrière réussi
La carrière de Bangoura en dehors d’Al-Nasr est couronnée de succès sur le plan personnel. Sorti de l’académie de Conakry en 2004, il se démarque au Gazélec Ajaccio avant de rejoindre Le Mans en 2005. Durant son passage dans la Sarthe, sa progression est fulgurante. Après une première saison prometteuse en Ligue 1, il explose en 2006 avec 12 buts et 5 passes décisives et s’ouvre les portes du Dinamo Kiev.
En Ukraine, il empile les buts, 40 en 71 matchs mais il est poussé vers la sortie et rejoint Rennes en 2009 où il s’imposera comme un titulaire en force. Mais son comportement agace la direction qui décide de le placer sur la liste des transferts. Après une saison 2009 avec 6 buts en 35 matchs de Ligue 1, il ne sera aligné que quatre fois la saison suivante avant d’être vendu pour 8M€ à Al-Nasr.
Des scandales autour des allocations Pole Emploi
Beaucoup de mouvements mais également une instabilité dans les emplois et les logements. Le salaire de Bangoura à Kiev n’a jamais été divulgué, mais un chiffre sur ses salaires à Rennes, Al-Nasr et Nantes existe. L’international Guinéen touchait 160 000€/mois à Rennes, 1,6M€/an à Al-Nasr et entre 10 et 20 000€ par mois à son arrivée à Nantes.
Un complément de salaire a existé pour le prolifique buteur après son passage à Nantes. En effet, lors de son passage à Al-Raed en Arabie Saoudite en 2016, l’intéressé avait touché les allocations Pole Emploi alors qu’il était sous contrat. Se défendant avoir un contrat amateur avec le club saoudien, ce dernier a été reconnu coupable et a été condamné à 6 mois de prison avec sursis et 132 000€ d’amende. Et pourtant, ce n’est pas le scandale le plus important.
« Avec de tels revenus, un footballeur a-t-il besoin d’arrondir ses fins de mois au préjudice d’un organisme public ? »
Le procureur du procès d’Ismaël Bangoura, en novembre 2018
Une saison en dents de scie et premiers déboires judiciaires pour Ismaël Bangoura
Dès son arrivée à Nantes, Bangoura se blesse. Une absence suite à un problème à la cuisse qui l’éloigne des terrains jusqu’a fin mars 2012 où il ne parvient pas à se remettre en jambes. Avec deux petits buts au compteur, il ne permet pas à Nantes de se sauver d’une irrégularité des résultats et le club termine à la 9è place du championnat.
La saison suivante n’arrangera pas les choses. Après seulement six rencontres sans résultats, Bangoura est envoyé en prêt au Qatar à Umm Salal où il ne jouera quasiment pas. Un contraste énorme par rapport à son début de carrière sur les chapeaux de roues et dont le joueur doit porter les critiques. Pendant son absence, Nantes retrouve la Ligue 1 après quatre ans passés dans l’antichambre de l’élite.
Le début des problèmes démarre durant la fin de saison 2013. Un an après le scandale sur sa rupture de contrat, la FIFA donne raison à Al-Nasr pour rupture unilatérale de contrat et sanctionne le club d’un an d’interdiction de recrutement. S’ajoute à cela une suspension de quatre mois pour Bangoura et une amende solidaire de 4,5M€ pour le club et le joueur. Une décision confirmée en appel en juin 2013 par le Tribunal Arbitraire du Football. Nantes va devoir assurer son retour dans l’élite sans se renforcer et avec l’incertitude de pouvoir conserver son effectif.
Une fin de parcours décevante et nouveau départ en Arabie Saoudite
Portés par un Filip Djordjevic impérial et un milieu de terrain Veretout-Bedoya-Deaux-Birama Touré, Nantes se maintient avec plus ou moins de difficulté en Ligue 1 avec une douzième place en 2014. Pour autant, Bangoura, après son retour de suspension, ne sera que l’ombre de lui-même. Ses deux dernières de contrat se terminent dans la douleur avec un bilan total de 6 buts en 48 matchs et sans jamais de lueur d’espoir pour le prodige du Mans de retrouver son niveau d’antan.
Indésirable en France, le champion d’Ukraine 2009 décide de prendre la direction de l’Arabie Saoudite, où il effectue de belles années en Saudi Pro League entre 2016 et 2019. Il revient en France en novembre 2019 du côté de Mulhouse mais l’aventure sera de courte durée. Après avoir été mis au placard à cause de son comportement et de ses piètres prestations à 35 ans, il retourne en Arabie Saoudite en 2020 du côté d’Al Taraji en troisième division saoudienne, loin des regards et recentré sur une seule passion qui l’anime toujours : le football.
Une place dans le Hall of Fame des pires joueurs par les supporters
Lors d’un recensement auprès des supporters du FC Nantes, le passage d’Ismaël Bangoura reste à jamais gravé comme un mauvais souvenir. Au départ motivés par l’arrivée d’un cador de son temps, le cauchemar s’est rapidement installé.
Parmi les joueurs cités avec Bangoura, on retrouve des noms comme Douglao (2008-2009), Guirane N’Daw (2008-2010) ou encore Kolbeinn Sightorsson (2015-2019). Un supporter des canaris s’est même amusé à faire un effectif avec le staff du pire FC Nantes depuis 1996. Vous pouvez retrouver toutes les informations sur le site de la Tribune Nantaise.
Du succès au scandale, Ismaël Bangoura fait partie de ces joueurs qui ont créé le folklore de notre sport favori. Il n’est pas le premier, ni le dernier à provoquer des scandales, mais sa prestation reste emblématique et gravée dans les mémoires. Alors que le mercato hivernal touche à sa fin, les panic buy vont nous réserver son lot de surprises. Avec peut être un parcours à la Bangoura à la clé ? On ne l’espère pas.
Crédit photo : FC Nantes