Categories: BalkansItalie

Goran Pandev, la légende de Strumica

Le 22 septembre 2022, Goran Pandev annonçait sa retraite du football. Avec ses débuts mitigés en Italie, personne n’aurait jamais imaginé son statut d’icône ultime de la Macédoine. Sans parler de sa participation au triplé historique de l’Inter en 2010. Comment Pandev est-il devenu un des joueurs symboles de la Série A et de son pays ?

L’envol de l’aigle romain

Loin des pelouses italiennes, Goran Pandev dispute sa première saison professionnelle lors de la saison 2000-2001. Le tout dans le club de sa ville natale, le FK Belasica. Cette première saison sera d’ailleurs la seule qu’il va passer dans son pays. A dix-huit ans seulement, le macédonien rejoint l’Inter Milan pour 250.000 €. Le tout après à peine 20 matchs chez les pros. A Milan, est trop haute pour le petit Goran, qui ne dispute aucun match avec les Nerazzurri. Des prêts en Série C (Spezia) puis en Série A (Ancône) vont permettre au macédonien de se faire remarquer par les dirigeants de la Lazio Rome, où il signe en 2004.

La Lazio est le club qui va permettre à Pandev de s’affirmer au haut niveau européen. Celui qui va devenir “Il Genio” va surtout être utilisé en tant que second attaquant. La saison 2006-2007 a été celle de la consécration pour Goran Pandev. Le macédonien a réalisé une saison remarquable à la fois sur le plan individuel et collectif. D’une part, la Lazio terminera troisième, qualificatif pour les tours préliminaires de LDC. D’autre part, Pandev a enregistré ses meilleurs résultats depuis son arrivée en Italie. En 39 matchs il inscrira 14 buts et 6 passes décisives. Le Macédonien va inscrire 64 buts et délivrer 24 passes décisives en 192 matchs, à la fin de son parcours chez les Biancocelesti.

La belle Lazio des années 2000, avec le trio offensif Pandev-Rocchi / Mauri… Souvenirs enfouis. (Crédits photo : Transfermarkt)

Au-delà des statistiques, la Lazio est le club où Pandev va découvrir la Ligue des Champions. Mais c’est aussi là où il remporte également la Coupe d’Italie en 2009, le premier trophée majeur de sa carrière. Il joue un rôle important dans la conquête de la Coppa, en finissant meilleur buteur de la compétition (6 buts). La star macédonienne est le meilleur buteur étranger de l’histoire du club de la Lazio et le dixième meilleur buteur de tous les temps des Biancocelesti. Le tout avant de bientôt se faire détrôner par le Serbe Sergej Milinković-Savić va bientôt le détrôner de ces deux records. La fin d’aventure à Rome sera en demi-teinte puisque Pandev, refusant de prolonger son contrat, est écarté du groupe. Son contrat sera finalement rompu après un passage devant le collège arbitral de la Ligue Italienne de Football. Libre de tout engagement, Pandev signe en janvier 2010 à l’Inter Milan.

Chapitre 2 à l’Inter, le vol plané en Serie A

Pour son retour en Lombardie, l’enfant de Strumica va faire un passage plus mémorable. Sans être l’élément majeur de l’équipe, Pandev a cette fois-ci un temps de jeu satisfaisant et contribue grandement à la conquête des titres. Et tout particulièrement au triplé historique de 2010 sous José Mourinho. Il dispute notamment 6 des 7 des matchs à éliminations directes de la Ligue des Champions ; y compris la finale disputée au Santiago-Bernabeu.

Il remporte ensuite la Supercoupe d’Italie et la Coupe du Monde des Clubs en étant décisif dans les deux finales. En dehors de ses buts importants, sa capacité à distribuer des passes décisives sera très utile.  La saison suivante est très décevante par rapport à la saison du retour. Loin des standards de l’Inter habituels, les Nerrazurri se consolent avec une Coupe d’Italie. De son côté, Pandev fait ressurgir l’une de ses plus grandes faiblesses au cours de sa carrière. Son manque de réalisme. Une saison avec seulement deux réalisations, ce qui finit par le mettre hors du XI. Que ce soit par Rafael Benitez ou Leonardo.

Ce qui n’a pas dû aider, c’est que, contrairement à la Lazio, le macédonien va être trimballé à tous les postes de l’attaque milanaise en jouant surtout en tant qu’ailier. Cette instabilité tactique est sûrement une des raisons qui explique la baisse de rendement de l’attaquant à l’Inter Milan. A l’issue de sa deuxième saison compliquée, Pandev quitte Milan pour le Napoli. D’abord en prêt, puis de façon définitive. Là-bas, il sera repositionné à son poste préférentiel : en deuxième attaquant. Il formera un bon soutien de Cavani ou Gonzalo Higuain par la suite. Le macédonien s’épanouit de nouveau comme au cours de ses années romaines et est important au sein du club.

En même temps, le profil de Goran Pandev a beaucoup aidé à lui donner une place de choix dans la cité napolitaine. Doté d’une technique impressionnante avec un fort pied gauche et d’une frappe de balle puissante, le macédonien fait aussi part d’une belle implication sur les tâches défensives.  Cependant, les belles performances de Marek Hamsik et les montées en puissance d’Insigne et Callejon vont réduire son temps de jeu. En trois saisons, il contribuera néanmoins au renouveau du club. A la clé, deux Coupes d’Italie et permettant au club de finir deux fois sur le podium de la Série A.

Une vieillesse que l’on ne voyait pas

Après trois saisons, 124 matchs, 22 buts et 24 passes décisives, Pandev est transféré en Turquie à Galatasaray. Bouché par Burak Yilmaz et Umut Bulut, il aura un très faible temps de jeu. Même s’il remportera la Süper Lig, il ne disputera que deux petits matchs de championnat. En Turquie, les esthètes ne sont pas au poste de numéro 9. Rapidement, il revient après une saison en Italie et s’engage au Genoa. A Gênes, le capitaine de la sélection macédonienne va retrouver le football qu’il aime.

Cependant, malgré des saisons honorables comme la saison 2019-2020, ses meilleures années sont passées. Il a bien dépassé la trentaine, sa coupe de cheveux en dit long. Mais par ses qualités techniques très au-dessus de la moyenne, Goran Pandev va avoir une certaine longévité. Même s’il ne remporte plus de trophée, il va contribuer à maintenir pendant plusieurs saisons le Genoa dans l’élite du football italien. Chose loin d’être aisée, vu la régression constante du Grifone. C’est d’ailleurs ici qu’il passera le cap des 100 buts en Serie A. Il va alors rester une valeur sûre du championnat italien pendant 7 saisons avant sa dernière expérience de 6 mois en Série B avec Parme. Le tout pour former un duo avec Franco Vazquez, bonjour le football dynamique.

La légende de la Macédoine

S’il n’a jamais fait partie des meilleurs joueurs de Série A, Pandev reste néanmoins la plus grande légende du football macédonien. Tout jeune, il fait ses débuts avec en sélection en 2001 contre la Turquie. Il marque son premier but en équipe nationale un an plus tard, lors d’un match amical contre Malte. Bien qu’il soit un indiscutable pour la Macédoine, les performances et les ambitions de la sélection ne sont pas en adéquation avec celle de son capitaine. Lui voulait sérieusement disputer les compétitions internationales. La première décennie des années 2000 va être très difficile pour la Macédoine qui va subir de nombreux échecs lors des différentes campagnes de qualifications. Mis à part des performances correctes en 2008 et 2010, rien de très positif n’est prôné.

De plus, les disputes entre Pandev et sa fédération sur le manque de développement des infrastructures pour contribuer à l’amélioration du niveau du football ne vont pas arranger les choses. Lassé du manque d’ambitions de sa fédération, Pandev claque la porte de la sélection en 2013. Il veut que les choses changent au sein de la fédération. Cependant, l’arrivée d’Igor Angelovski à la tête de la sélection va changer les choses et faire ramener la légende en 2016. Même si les débuts ne sont pas fulgurants, les premiers résultats ne vont pas tarder à venir. Premier fait marquant, le match nul 1-1 contre l’Italie en 2017 lors des éliminatoires de la CDM 2018. Comme un symbole.

Aucun joueur n’aura été un tel porte-étendard d’une sélection peu reconnue. On dépasse même le stade de la légende. (Crédits photo : Transfermarkt)

Quinze ans de labeur récompensés

En 2018, la Macédoine dispute la Ligue des Nations et finit facilement à la tête de son groupe. Ce qui lui permet de décrocher un ticket pour les barrages de qualification pour l’Euro 2020. Pendant la campagne de qualifications pour l’Euro 2020, la Macédoine va finir troisième de son groupe. Ce qui est un bon résultat même s’ils restent assez loin de la Pologne et de l’Autriche.

Les barrages seront donc la voie de qualification à l’Euro pour les Lions rouges.  Après plusieurs reports dus au coronavirus, le match contre le Kosovo a finalement lieu et la Macédoine s’impose 2-1 et file en finale de barrages contre la Géorgie. Le 12 novembre 2020 deviendra un jour mémorable pour Pandev et l’ensemble du peuple Macédonien. A l’honneur sera mis un homme qui a lutté pendant plus de 20 ans avec son pays. C’est bien Goran Pandev qui marquera le but de la délivrance. Celui qui a qualifié tout un pays pour une première compétition internationale. Lorsque l’unique but de la rencontre a été marqué, Goran Pandev a pleuré, ne réalisant pas encore qu’il avait rendu tout un pays fier.

Dans la foulée, porté par une défense de fer mise en oeuvre par Angelovski, la Macédoine va s’offrir une autre victoire de prestige. Lors des éliminatoires du Mondial 2022, le soleil macédonien brillera face à l’Allemagne, 2-1. Comme un symbole, il y aura but de Pandev et de celui qui est considéré comme son successeur, Eljif Elmas.

La belle histoire continue à l’Euro. Malgré une élimination et trois défaites en poules, Pandev ouvrira le score dans le match face à l’Autriche. Comme un symbole. Ce qui sera aussi le cas quelques jours plus tard, contre les Pays-Bas. Les Oranjes ne font pas de débat et gagnent 3-0, mais l’important est ailleurs. 69e minute, Amsterdam est concentré par autre chose : la sortie de Goran Pandev. Se sachant éliminés, toute la délégation fait honneur à son héros. Tous les titulaires viennent et leur font une haie d’honneur. Même son ancien coéquipier, Wesley Sneijder, est aperçu en train d’applaudir. Un des plus beaux moments de cet Euro 2021. En conclusion, Goran Pandev en sélection, c’est 20 ans, plus de 122 matchs pour 39 buts inscrits. Ce qui fait de lui le joueur le plus capé et le meilleur buteur de l’histoire de la sélection. Le plus grand, tout simplement.

Les moyens de construire son héritage

Au-delà de son histoire avec la sélection, Pandev crée son académie de football Akademija Pandev en 2010. Le tout dans sa ville natale, Strumica. Le but de l’académie ? Faire ce que la fédération macédonienne ne fait pas. A savoir se concentrer sur le développement des jeunes joueurs de football de la région en leur fournissant les entraînements et les ressources nécessaires pour atteindre leur plein potentiel. Cela ira même plus loin, lorsque l’Akademija Pandev lance par la suite une équipe senior. Equipe senior qui va finir par remporter la Coupe de Macédoine du Nord en 2019 et se qualifie pour la première fois de son histoire en Ligue Europa pour la saison 2019-2020. Ils auront même été vice-champions la saison dernière. Dommage qu’il n’ait pas terminé sa carrière de club là-bas, on se serait sûrement bien amusés.

La carrière de Goran Pandev en club n’est sûrement pas parmi les plus grandes de l’histoire du foot. Mais le joueur macédonien a toujours été un élément sûr de ses différents effectifs. Joueur attachant dans les différents clubs où il est passé ; légende dans son pays, Goran Pandev n’a pas laissé indifférent les amateurs de football ces 20 dernières années. Jamais de saison à 15 buts en championnat, mais son implication et ses contributions dans ses différentes équipes ont fait de lui un joueur mémorable de la Série A pendant près de deux décennies. En lançant de plus l’histoire de la sélection macédonienne. 

Ukuthamba

Recent Posts

Ryan Gauld, le chemin de croix de Saint-André

Surprise inespérée de la trêve internationale, Ryan Gauld, 28 ans, fut appelé pour la première…

4 jours ago

Coupe du Monde Futsal 2024 : Impossible n’est plus français

Lundi 16 septembre 2024 : date à marquer d'une pierre blanche dans l'histoire du futsal…

2 semaines ago

[EDITO] Didier Roustan, c’était LE foot

Une annonce comme un orage, comme un naufrage en ce mercredi 11 septembre 2024 pour…

3 semaines ago

[EDITO] Paris 2024, une étincelle d’espoir

Dans un mélange d'allégresse et d'une petite amertume, les Jeux Olympiques de Paris 2024 ont…

1 mois ago

Nico Williams – Lamine Yamal : quand les ailes attaquent

Loin de faire partie des favoris avant le début de l'Euro 2024, l'Espagne subjugua tout…

3 mois ago

Espagne : à la croisée des chemins (Preview Euro)

Sélection incontournable de la fin des années 2000 jusqu’au milieu des années 2010, l’Espagne tente…

3 mois ago