Géorgie – Steppes by steppes (Preview Euro)

Seule nation à faire ses débuts en compétition internationale, la Géorgie est déjà victorieuse de se trouver ici. Emmenés par une future star comme Khvicha Kvaratskhelia et l’aventurier Willy Sagnol, l’euphorie prime logiquement sur la raison. Impossible de leur en vouloir après tout. Pourtant, cette nation, avec un peu de travail et de réussite, pourrait bien ne pas se contenter d’une participation éclair. A voir s’ils peuvent encore soulever des montagnes.

L’article n’est que traduit par l’auteur que vous pouvez observer juste au dessus. L’article fut en réalité écrit par Luka Lagvilava, connu sur Twitter sous le nom de “GeorgianFooty“, que nous vous invitons à suivre. C’est aussi pour cette raison qu’un article en version anglaise (en version originale, donc) sortira dans la foulée.

La Géorgie. Nation trempée d’histoire, de folklore et passionnée de football, se prépare lentement pour ce qui deviendra premier match dans une grande compétition. En sa capitale, Tbilissi, réside l’un des plus grands clubs soviétiques des années 80 : le Dinamo. Vainqueur de la Coupe des Coupes 1981 sous la houlette du charismatique Nodar Akhalkatsi, ce sera bien la seule fois où leur football pourra avoir un coup de projecteur. Pourtant, après la dislocation de l’Union Soviétique, des joueurs comme Giorgi Kinkladze, Shota Arveladze ou Temuri Ketsbaia composaient une bonne base. Mais des problèmes politiques, économiques et sociaux retarderont l’échéance. Malgré une phase de qualification très laborieuse, avec Espagne, Ecosse et Norvège au sein de son groupe, la Ligue des Nations délivrera un bien précieux sésame. Une deuxième opportunité plus heureuse, après son échec en 2020, aux tirs aux buts contre la Macédoine. Déterminés et accueillant l’évènement chez elle – au stade Boris Paichadze -, la Géorgie se trouvait prête à ne plus laisser passer sa chance. Une victoire convaincante contre un beau Luxembourg, puis vint la Grèce. Malgré les menaces persistantes de Giorgos Masouras ou Anastasios Bakasetas, l’équipe de Willy Sagnol tiendra. Puis, après une séance de tirs aux buts haletante où Giorgi Mamardashvili prendra son rôle à cœur et où Giorgos Giakoumakis craquera, la Géorgie peut se réjouir. Trente ans de déceptions pour cela. Une fête, une extase de plusieurs semaines sur l’ensemble de territoires, ainsi qu’un grand nombre de curieux qui iront enfin jeter un œil sur une nouvelle contrée.

Une Géorgie des plus cosmopolites

Pourtant, la Géorgie n’avait pas manqué de faire vendre ses talents sur ces dernières années. De par la saison 2022-2023 magique du Napoli, Khvicha Kvaratskhelia s’est retrouvé sur les lèvres de tout fan de football. Montant lentement en puissance et proche d’un départ de Valencia, Giorgi Mamardashvili fera partie des gardiens à suivre cet été et dans la compétition. Deux noms voués à jouer les leaders techniques, mais ils sont loin d’être seuls. Revenu très fort avec Metz, la sensation Georges Mikautadze (vingt matchs, treize buts, quatre passes décisives en Ligue 1) ne pourra être ignorée. Lui aussi à suivre au mercato estival, le meneur de jeu Otar Kiteishvili, grand artisan du titre historique du Sturm Graz (Autriche), en terminant meilleur joueur du championnat. Zuriko Davitashvili n’est pas en reste, se permettant de montrer toute sa qualité dans des Girondins moribons, sur et en dehors des terrains. Un groupe empli de jeunes pépites, encadré par de vieux loups comme Guram Kashia, Giorgi Loria ou Saba Lobjanidze.

Vous avez tous fait géorgien LV2, je présume ? (Crédit photo : Georgian Football Federation)

Evidemment, vous ne reconnaissez pas un nom. Normal, puisque la fédération publie ses listes en géorgien. Rare exception, nous allons écrire ci-dessous les vingt-six sélectionnés pour l’Euro 2024 :

Gardiens de but :  Giorgi Mamardashvili (Valencia), Giorgi Loria (Dinamo Tbilissi), Luka Gugeshashvili (Qarabag)

Défenseurs Solomon Kverkvelia (Al-Akhdood, Arabie Saoudite), Giorgi Gvelesiani (Persepolis, Iran), Guram Kashia (Slovan Bratislava, Slovaquie), Jemal Tabidze (Panetolikos, Grèce), Lasha Dvali (Apoel Nicosie, Chypre), Luka Lochoshvili (Cremonese), Otar Kakabadze (KS Cracovia, Pologne), Giorgi Gocholeishvili (Shakhtar)

Milieux de terrain : Giorgi Chakvetadze (Watford), Anzor Mekvabishvili (Universitatea Craiova, Roumanie), Oter Kiteishvili (Sturm Graz, Autriche), Nika Kvekveskiri (Lech Poznan, Pologne), Giorgi Kochorashvili (Levante), Sandro Altunashvili (Wolfsberger, Autriche), Levan Shengelia (Panetolikos, Grèce), Giorgi Tsitaishvili (Dinamo Batumi, Géorgie), Saba Lobjanidze (Atlanta United), Gabriel Sigua (FC Bâle)

Attaquants : Zuriko Davitashvili (Bordeaux), Budu Zivzivadze (Karlsruhe SC), Giorgi Kvilitaia (Apoel, Chypre), Georges Mikautadze (Metz) Khvicha Kvaratskhelia (Napoli)

Chose impressionnante chez la Géorgie : son éclectisme. Pour vingt-six joueurs, pas moins de vingt championnats différents seront représentés au sein de la délégation. Compétitions pouvant varier de la Nike Liga slovaque, du Protathlima Cyta chypriote, jusqu’à l’Iran et la MLS. Cinq joueurs se trouvent aussi en divisions inférieures, respectivement Giorgi Kochorashvili, Luka Lochoshvili, Giorgi Chakvetadze, Budu Zivzivadze et Zuriko Davitashvili.

En ce qui concerne la liste, peu de surprises sauf une. Jaba Kankava, ancien du Stade de Reims, aussi connu pour avoir sauvé la vie de l’ukrainien Oleh Husyev. Deuxième joueur le plus capé de l’histoire des Croisés (101 sélections), le dur au mâle prendra sa retraite internationale en 2021. Avant de revenir en baroud d’honneur lors des barrages, avec neuf minutes de jeu contre le Luxembourg. Malgré l’appel de Willy Sagnol pour faire partie du voyage, le Capitaine Courage refuse. Il souhaite avant tout profiter, et vivre cette compétition comme supporter. Sans le moindre regret. Place aux jeunes, avec Gabriel Sigua (2005, deux sélections), cadet de la liste, se faisant lentement une place dans un Bâle en reconstruction.

 

(Crédit photo : BuildLineup.com)

Tactique de prédilection de Willy Sagnol depuis fin 2021, la Géorgie composera en 5-3-2. Tenant un bloc plutôt bas, limitant au maximum le nombre d’espaces pour l’adversaire et en comptant grandement sur les transitions offensives. Ces transitions passeront par l’utilisation de pistons, partant en bombe pour supporter Khvicha Kvaratskhelia. Le nouveau Maradona, dans une position axiale à la base, portera un rôle d’ailier inversé, censé être partout à la fois. Sur le côté droit, on retrouve une option plus défensive avec Otar Kakabadze, resserrant les espaces avec le central droit, zone où la sélection géorgienne eut parfois des difficultés.

Dans l’entrejeu, Giorgi Kochorashvili fut une bouffée d’air frais. Remplaçant à Levante cette saison, le milieu se voit assigner un rôle de récupérateur de ballons, jamais fatigué, couvrant bien plus d’espaces sur le terrain que ses comparses. Son partenaire Otar Kiteishvili se retrouvera dans un rôle de box-to-box, liant entre la défense et l’attaque. Ce qui permettre à Giorgi Chakvetadze de se déplacer librement, afin de construire des attaques.

Que ce soit Mikautadze ou Zivzivadze titulaire, ce sera bien Khvicha Kvaratskhelia qui prendra le rôle d’électron libre dernier tiers, recevant le cuire de tous les côtés, sur et en dehors de la surface. L’ailier napolitain demeure le plus prolifique de l’équipe, représentant aussi une menace constante avec le ballon. Si Zivzivadze reste une option de qualité devant, Georges Mikautadze fait partie des meilleurs joueurs de Ligue 1 sur la deuxième partie de saison, si ce n’est d’Europe. Apportant une tonne de dynamisme à l’équipe, le messin devra être un véritable poison dans la surface, mais aussi à l’extérieur, comme il peut avoir l’habitude de le montrer.

Une belle brochette de talents

On ne vous apprend rien si Khvicha Kvaratskhelia sera l’homme à abattre lors de ce tournoi. Talisman de la Géorgie sur ces quatre dernières années, il fait déjà partie des trois meilleurs buteurs de l’histoire de la sélection (quinze buts), en seulement 29 sélections. Le rempart valencian Giorgi Mamardashvili a gravé son nom dans le marbre des meilleurs gardiens de Liga cette saison, avec pas moins de treize clean sheets et le plus haut taux de buts évités en championnat (9.27). A 23 ans, Mamardashvili est bien le pilier de cette défense, et l’intérêt que peuvent porter des clubs comme Newcastle devrait lui donner une motivation supplémentaire.

Attention ton genou, Giorgi. (Crédit photo : Georgian Football Federation)

Il faut aussi mentionner le “Kvaratskhelia, avant Kvaratskhelia” n’étant autre que Giorgi Chakvetadze, héros local lors de la première campagne de Ligue des Nations. Alors qu’il faisait partie des grands espoirs de Jupiler League, l’ancien joueur de la Gantoise porta à lui tout seul la sélection jusqu’aux barrages d’Euro 2020 (quatre buts en six matchs). Les blessures auront eu raison de lui, mais il a pu se permettre une seconde chance à Watford, où il retrouva du temps de jeu et la qualité qu’on lui connaît. Lentement rentré dans un rôle axial en tant que meneur de jeu, Chakvetadze sera bien le joueur-clé à la création géorgienne. Une création que Mikautadze et Budu Zivzivadze devront convertir. Les deux possèdent des palettes différentes, mais peuvent très bien apporter de l’impact à leur manière. Vif et pratiquant d’un joueur direct, Mikautadze peut apporter le danger d’à peu près n’importe ou, quand la grande tige de Karlsruhe Zivzivadze aime rôder auprès des défenseurs, se battre pour chaque ballon et se comporter en véritable renard des surfaces.

Tirés dans le groupe F aux côtés du Portugal, la Turquie et la République Tchèque, cette Géorgie pourrait bien faire un coup lors de leur première participation internationale. Même si les espoirs et l’enthousiasme sont grands, le manque d’expérience pourrait bien être impossible à surmonter (surtout contre des équipes comme le Portugal), le tout contre des équipes beaucoup plus rôdées, toutes présentes au dernier Championnat d’Europe. Les Croisés pourraient bien à la fois passer le premier tour, tout comme ils pourraient bien passer à la trappe sans honneur ni relief. Même si l’honneur, au fond, fut déjà bien rempli, au soir du 26 mars 2024.

Mathieu Plasse (FDM)

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