Nation ancestrale du ballon rond, l’Ecosse persévère dans sa montée en puissance au sein du football européen. Après deux décennies de disette, le pays du Loch Ness enchaîne une deuxième participation consécutive au Championnat d’Europe. Au terme d’une campagne excellemment menée, la Tartan Army réunit presque toutes les conditions d’une épopée. Découvrons ensemble le pourquoi du comment.
Cet article n’aurait pu être aussi complet sans l’aimable participation de Scottish Football, compte Twitter français relayant l’actualité du football écossais, que nous vous invitons à suivre.
Jouer de la cornemuse dans tous les restaurants bavarois, ou montrer son attirail en direct à la télévision allemande. Quitte à ce que les irlandais reviennent un jour nous émerveiller de par leur joie de vivre et leur « Twinkle twinkle, little star », les écossais ont repris le rôle de cet ami que l’on invite à toutes les fêtes. Un trait de caractère que l’on n’aurait prêté à ce peuple, souvent rallié à leur temps pluvieux et nuageux. Pourtant, les raisons d’être enthousiastes se multiplient comme les chardons. Deuxième participation consécutive au Championnat d’Europe, quelque chose d’utopique pour eux au XXIe siècle. Mais surtout, la possibilité concrète de passer une phase de poules, chose que la sélection écossaise n’a jamais réalisé de toute son histoire. Un comble, lorsque ton premier match – premier match international de l’histoire de ce sport – s’est déroulé le 30 novembre 1872. Un élan d’euphorie justifié à travers l’homme de ce renouveau : Steve Clarke.
A l’image d’un certain Didier Deschamps dix ans auparavant, Steve Clarke réussissait l’impossible. Un exploit que Loïs Guzukian (administrateur du compte Scottish Football) explique : « Il a réconcilé le football avec la nation écossaise, embêtée par les innombrables échecs durant une vingtaine d’années. Les écossais sont redevenus fans de leur équipe. Il a transformé cette sélection et lui a redonné le goût de la victoire et de se dépasser. ». Au-delà d’un nouvel élan de solidarité, on note une revalorisation de certains joueurs, passant des paliers grâce à la sélection : « Entre autres, il a sublimé John McGinn, fait de McTominay un Box To Box prodigieux alors que plus personne n’y croyait. Il a créé un vrai groupe Ecosse, un véritable bloc sur lequel construire. ».
1er juin 2022. Hampden Park se trouve en pleine apoplexie. Martyrisés par une équipe ukrainienne en mission pour ravir leur peuple affaibli par les bombes, l’Ecosse ne se rendra pas à la Coupe du Monde 2022. Un échec de plus pour une nation n’ayant jamais connu ce Graal depuis 1998, mais un échec très douloureux. De par la progression de la sélection, prompte à pouvoir revenir dans les trente-deux élus, mais aussi par la qualité de la prestation. Une heure de jeu à subir les incursions de Tsyhankov et Yarmolenko, ainsi que les superbes ballons d’Olexandr Zinchenko. Un grand coup de Claymore dans l’eau, qui ne changera pas grand-chose à l’organigramme. Steve Clarke, en poste depuis 2019, est conservé, avec pour objectif d’enchaîner une deuxième qualification consécutive en Championnat d’Europe.
Après une campagne de Ligue des Nations bienheureuse contre l’Ukraine, l’Irlande et l’Arménie, l’objectif va être rempli. Et de quelle manière ! Après une entrée en matière facile contre Chypre (3-0), arrive le plat de résistance. L’Espagne du nouveau venu Luis de la Fuente se rend à Hampden Park, et a montré qu’elle restait loin du rodage dans lequel l’Ecosse s’est affirmé. Sans complexes et porteurs d’une énorme intensité contre un jeu de passes stéréotypé, la sélection se transforma le temps d’un soir en guerriers de William Wallace. Le héros ? Scott McTominay. Intégré dans le rôle lui siégeant le plus, celui d’un box-to-box avec une grosse influence dans le dernier tiers, le mancunien posera deux doublés en deux matchs. Un véritable combat à l’entrée de la surface.
A partir de là, la dynamique se lance. Succès contre la Norvège d’Erling avec deux buts dans le moneytime ; succès maîtrisé contre la Géorgie (2-0) ; logique respectée au match retour en Chypre (3-0)… Cinq victoires en cinq matchs, les assurant presque automatiquement pour une place en Championnat d’Europe. Peut-être leur meilleure campagne de qualifications depuis l’Euro 2008 et ce diable de James McFadden. Bémol, le relâchement et l’absence de résultats convaincants à partir de septembre 2023. De par ses prestations en amicaux très inquiétantes (1-4 contre la France, 0-4 contre les Pays-Bas, et même 0-1 contre l’Irlande du Nord), l’Ecosse n’aura gagné qu’un seul match sur les neuf derniers mois. Contre Gibraltar (2-0), le 3 juin dernier. Pas de quoi lancer une dynamique. Peut-on relancer une machine en un rien de temps, surtout lorsque l’on commence sa compétition contre le pays organisateur ?
Alors que certains pays doivent faire revenir des anciennes gloires de leur retraite pour servir l’entrejeu, l’Ecosse ne se trouve point dans ce cas de figure. Des joueurs comme John McGinn ou Scott McTominay se sont imposés comme des valeurs sûres de la Premier League. Ryan Christie sort d’une saison solide avec Bournemouth, Billy Gilmour a enfin été régulier en club et Stuart Armstrong (Southampton), ainsi que Callum McGregor (Celtic) continuent de se comporter en leaders. En somme, un milieu composé presque intégralement de joueurs dans leur meilleure forme. Seul Ryan Jack, caution de back-up en milieu défensif, ne serait pas concerné par le propos. L’Ecosse devra cependant faire sans des éléments tels que Lewis Ferguson, après une saison de confirmation dans le Bologne de Thiago Motta.
Dans le secteur défensif, la sérénité se tient, malgré une grosse incertitude. Si Angus Gunn (Norwich City) assura la relève de Craig Gordon dans les cages ; si des valeurs sûres subsistent telles qu’Andrew Robertson, Kieran Tierney ou encore Jack Hendry (Al-Ettifaq) ; un poste ne peut en dire autant. Celui de piston droit. Pour la raison que deux hommes manquent à l’appel. Le premier étant Aaron Hickey, rongeant son frein à Brentford depuis sa blessure fin octobre. Le deuxième étant Nathan Patterson, perdant progressivement sa place à Everton et terrassé par une blessure en avril. Champ libre pour Anthony Ralston, réputé au Celtic pour sa dureté au mâle.
Problème qui pouvait déjà être évoqué à l’heure de l’Euro 2021, le registre offensif risque d’être trop juste. Si Che Adams reste un attaquant très généreux, auteur d’une belle fin de saison à Southampton, difficile de le voir passer un palier comme celui-ci. Si Lawrence Shankland (Hearts), meilleur buteur du championnat écossais (24 buts) et choix de Steve Clarke en pointe sur l’année 2024, possède un véritable sens du but, sera-t-il suffisant pour une telle compétition ? Une difficulté n’arrivant jamais seule, Lyndon Dykes, titulaire à l’Euro 2021, dût déclarer forfait il y a une dizaine de jours. Laissant place à Tommy Conway, inscrivant sa dizaine de buts à Bristol City.
La liste ne brille pas par ses surprises, Steve Clarke étant sûr de ses idées. Bien qu’il reçut à raison bien des éloges durant son mandat, le technicien reste parfois borné ou frileux sur certains points. Et ce ne sont pas les demandes incessantes des fans concernant Ryan Gauld qui le feront changer d’avis. Toujours pas de petit meneur fantasque, bientôt la trentaine, terrorisant la MLS depuis Vancouver, et qui n’aura jamais reçu la moindre petite cape. Le Teji Savanier des Highlands. Pas de Ben Doak (Liverpool) ni d’Harvey Barnes, leur fiabilité physique ou le manque d’ailiers dans la tactique de Steve Clarke n’aidant pas. Milieu risquant à l’avenir d’intégrer le groupe, Elliot Anderson, s’imposant lentement à Newcastle comme un porteur d’eau de qualité, regardera la compétition depuis son canapé.
Steve Clarke nous ayant habitué à cette combinaison, difficile de prévoir autre chose qu’un 3-4-2-1, modulable en 5-4-1 sous séquences défensives. En tant que lecteur attentif, vous n’aurez pas manqué de noter la présence, à la fois d’Andrew Robertson et de Kieran Tierney, replacé en central gauche. Un central excentré n’hésitant pas à monter pour épauler son collègue liverpuldien, comme nous pouvons souvent le noter dans des formations à trois défenseurs. Jamais deux sans trois, puisqu’Aaron Hickey se retrouvait à jouer sur le côté droit écossais avant sa grave blessure. La petite incertitude dans le onze de départ se retrouvera dans la charnière. Ryan Porteous (Watford), excellent durant la phase de qualifications, s’est vu écarté par le retour du vétéran Grant Hanley (Norwich), retrouvant progressivement son rythme.
Malgré une qualité au milieu n’ayant pas à rougir des grandes sélections européennes, l’Ecosse possède cependant des difficultés à créer ses occasions. On pourrait même se permettre de penser que le jeu écossais reste encore peu flamboyant. Si la Tartan Army cherche à obtenir une possession sereine, à faire le jeu, ce constat se brise un peu une fois arrivé au dernier tiers. En effet, on retrouve une tendance à changer de rythme, à faire reculer la défense de part des appels sans ballon (Che Adams étant très bon dans ce registre) pour que les milieux puissent s’amuser. On peut même affirmer que l’Ecosse conserve meilleure efficacité en transitions, la preuve avec le doublé de McTominay contre l’Espagne. Preuve encore plus parlante, les deux joueurs ayant inscrit plus d’un but durant la campagne de qualifications portent le nom de… Scott McTominay (sept buts) et John McGinn (trois buts). Shankland risque de s’ennuyer comme un rat mort.
L’Ecosse faisant partie des nations émergentes, à savoir proches d’atteindre le gratin, elle ne peut non plus se permettre de jouer tous azimuts. Voilà pourquoi sur phases défensives, on peut s’attendre à un bloc bas bien regroupé, avec McGinn et Ryan Christie (les deux joueurs juste derrière la pointe) densifiant le milieu. Tout cela pour opérer à la récupération, vous l’aurez compris, une transition un petit peu « kick and rush » modernisé. Dans le sens, où plutôt que d’être très direct, on ne verra que peu de longs ballons dans ces séquences. L’espace se sera déjà créé de par l’adversaire, monté très haut sur sa propre possession. Une opposition de styles assez intéressante, quand on sait que l’Ecosse aura à jouer des meneurs de jeu comme Florian Wirtz ou Dominik Szoboszlai.
Une méfiance tactique qui peut se voir dans un autre registre. En effet, Steve Clarke, malgré tout le soutien qu’il peut recevoir, est souvent critiqué pour sa gestion des remplacements. Pour reprendre Loïs Guzukian, « Clarke reste faillible. Il est parfois trop frileux et surtout trop campé sur ses positions, ce qui peut amener à quelques choix bizarres dans les changements. Des choses réapparues sur les amicaux de mars contre les Pays Bas & l’Irlande du Nord, surtout contre ces derniers où la défaite fait beaucoup plus tâche. La défaite aux Pays-Bas, en réalité, ce sont les remplaçants qui tuent le match pour l’Ecosse. »
Si l’entrejeu écossais se compose de joueurs comme Scott McTominay ou John McGinn, il serait un peu ennuyeux de se tenir uniquement aux principales attractions. A la place, nous vous proposons de croire en la revanche de Billy Gilmour, composant le double pivot avec le mancunien. Longtemps attendu comme le prodige qui pouvait redynamiser le milieu de Chelsea (avec un certain Conor Gallagher) ; ni Frank Lampard, ni Thomas Tuchel n’oseront lui faire confiance. Une grave blessure au genou minera aussi ses chances de s’imposer dans l’immédiat. A la place, un prêt pour Norwich lui sera proposé, et comme l’immense majorité des passages des Canaries en Premier League, ce fut un fiasco. Au point qu’il se retrouvait régulièrement hué par les supporters lorsque subvenait un changement.
Après une telle déconvenue, un endroit lui offrant des garanties et un cadre sûr ne pouvait qu’être bienvenu. Chelsea ne pouvant lui offrir, les Blues cèderont leur talent à Brighton. Comme cadre sûr pour un jeune talent, on ne fait pas mieux en Angleterre. Surtout lorsque le club se sépare de Moises Caicedo pour un montant pharaonique en direction de… Chelsea. La nature est bien faite, en fin de compte. Roberto de Zerbi n’a jamais manqué de compliments le concernant, le responsabilisant toujours plus au sein de l’équipe, tout en prenant compte de sa fragilité physique.
« La progression de Billy est incroyable, je l’adore car il se comporte davantage comme un leader. Il a amélioré sa qualité de passe, sa manière de comprendre le jeu et comment mener le ballon. Il a compris quand il doit jouer court et long, et sa réaction à perte est très plaisante. » Roberto de Zerbi
Si le futur entraîneur de l’Olympique de Marseille (on s’avance) ne tarit pas d’éloges le concernant, c’est bien parce que l’écossais possède des qualités avancées et variées. Un véritable meneur de jeu reculé, capable de tenir sous pression de par son jeu de corps et sa qualité de scan au-dessus de la moyenne. Sa faculté à savoir se positionner sans ballon, porter le ballon de longues secondes dans des zones-clés sans la moindre pression, pourrait même nous rappeler un certain Hibou voire un certain Stanislav Lobotka. Leur taille semblable (169 centimètres pour le joueur de Brighton) n’aidant pas. Au-delà de faire respirer le jeu, Billy Gilmour sait le faire avancer. Une alternance jeu long / jeu court de qualité, collant bien avec le jeu autocentré sur l’entrejeu prôné par Steve Clarke. A noter que les deux possèdent des points communs, tels que leur origine du North Ayrshire, ainsi que leur amour pour Chelsea (l’actuel sélectionneur ayant effectué 330 apparitions sous le maillot des Blues).
Si l’aspect défensif n’est pas vraiment son fort de par son désavantage physique, le meneur de jeu compense par sa combativité et son intelligence de jeu. Rares, les fois où on le verra rechigner à presser le porteur du ballon ou un joueur effectuant un appel. Un fighting spirit que l’on put voir lors du précédent Euro, où il fut élu Homme du Match contre la Perfide Albion. Si seulement le coronavirus ne s’en était pas mêlé… Callum McGregor risque bien sûr d’être titulaire à sa place sur la compétition, mais cette compétition restera déterminante pour lui, profitant de chaque seconde sur le terrain pour montrer sa valeur.
Malgré l’absence de dynamique de par une année 2024 peu probante en résultats, l’Ecosse peut tout à fait réaliser son rêve. Celui d’enfin passer une phase de poules de compétition internationale. Si bien sûr, se retrouver au match d’ouverture contre la Mannschaft n’est pas une position favorable, il n’empêche que la sélection demeure supérieure à celle de 2021. Plus expérimentée, plus sûre d’elle, plus garnie de joueurs au gros statut, tout semble jouer en leur faveur.
De plus, on retrouve deux autres adversaires dans leur poule, bien abordables. Si la Hongrie (23 juin, 21 heures) peut aussi être l’empêcheur de tourner en rond de la compétition ; la Suisse (19 juin, 21 heures) se trouve dans un contexte récent très difficile. A tel point qu’elle pourrait bien composter le billet des autres pour le tour suivant. La Tartan Army reste dans une position avantageuse, qui peut bien faire vibrer les Lochs. Encore faut-il savoir remettre une pièce dans la machine
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