Brésil : le destin tragique de Chapecoense

Depuis quelques jours, les championnats d’État brésiliens ont repris leur droit. À Santa Catarina, l’équipe de Chapecoense figure parmi les prétendants au titre malgré une 5e place l’année dernière. Il y a pourtant plus de six ans, le club était victime d’un drame sans précédent : l’avion de la délégation brésilienne s’écrasait à Medellín, faisant 75 victimes. Une histoire tragique qui est encore gravée dans les mémoires aujourd’hui.

UNE FINALE À DISPUTER EN COLOMBIE

La semaine s’annonçait belle et radieuse pour le club de Chapecoense, le club de la ville de Chapecó. Les 180 000 habitants de cette ville attendent avec impatience la finale de la Copa Sudamericana, l’équivalent de la Ligue Europa en Amérique du Sud. Nous sommes en novembre 2016 et tous les voyants sont au vert pour ce club. Après deux matchs nuls en demi-finale contre les Argentins de San Lorenzo, Chapecoense s’apprête à disputer sa première finale continentale contre les Colombiens de l’Atlético Nacional. Une ville entière se vêtit de vert et de blanc, les couleurs de Chapecoense.

Dans l’effectif de cette équipe, certains joueurs sont connus sur le continent européen. C’est le cas de Cleber Santana, milieu de terrain passé par l’Atlético de Madrid de 2007 à 2009. Matheus Biteco a également effectué une pige du côté d’Hoffenheim en 2016 pendant 6 mois, avant de retourner au pays. Un effectif complet, une équipe ambitieuse et un soutien sans faille : l’équipe a toutes les cartes en main pour écrire les plus belles pages de son histoire. Mais un terrible évènement va faire basculer le club dans une terrible tragédie.

L’AVION VICTIME D’UN PROBLÈME MÉCANIQUE

Le 28 novembre 2016 restera à jamais un jour noir pour Chapecoense. L’avion qui transportait toute la délégation brésilienne s’est écrasé près de l’aéroport de Medellín. Le bilan est très lourd : seules 6 personnes ont survécu parmi les 81 passagers. Un problème technique sur l’appareil est à l’origine de cet accident dramatique. Les trois joueurs rescapés (Neto, Jackson Follmann et Alan Ruschel) sont sous le choc de ce drame. Neto est d’ailleurs revenu sur cette tragédie quelques mois après : “Je ne me rappelle pas du crash de l’avion. Je me souviens qu’il tremblait beaucoup, j’avais l’impression qu’il manquait de la puissance. On a ensuite entendu les sons des alarmes, nous savions qu’il y avait une urgence. Je me suis réveillé 10 jours après à l’hôpital. Lorsque j’ai vu le médecin du club, j’ai eu un flash : la finale de la Copa Sudamericana. Pour ne pas me brusquer, il m’a dit que je m’étais blessé pendant le match. Mais quand j’ai vu l’état de mon corps, j’ai compris qu’il me mentait. Quand on m’a dit la vérité, c’était un choc, le plus gros choc de ma vie. Sur le coup, je pensais que tout le monde était en vie car je l’étais de mon côté. Quand j’ai demandé comment allaient mes coéquipiers, on me répondait qu’ils étaient décédés.”

UN RENOUVEAU RAPIDE

L’Atlético Nacional et la CONMEBOL sont tombés d’accord pour attribuer le titre à Chapecoense, les matchs de la finale n’ayant pu être joués. À titre posthume, l’équipe entière est déclarée vainqueur de la Copa Sudamericana. Dans une Arena Condá bondée, l’émotion est à son comble. Les rescapés ainsi que les familles des joueurs décédés se recueillent et rendent hommage aux défunts. L’équipe aurait alors pu disparaitre. Mais en quelques semaines, plus de 20 joueurs rejoignent le club, un staff est mis en place et Chapecoense retrouve le chemin du rectangle vert. Parmi ces arrivants, Túlio de Melo, l’ancien attaquant lillois qui n’a pas hésité une seule seconde avant de rejoindre cette équipe : “Plus de 20 joueurs sont arrivés. Il n’y avait pas d’automatisme. On s’est tous dit qu’on va construire tout ça ensemble. Les supporters savent que l’on fera de notre mieux, qu’on donnera tout sur le terrain pour Chapecoense.”

Tulio De Melo sous les couleurs de Chapecoense. / Crédit : AS

CHAPECOENSE, LA REMONTÉE EN LIGNE DE MIRE

Malheureusement en 2019, le club termine à la 19e place, synonyme de descente en deuxième division. Le passé douloureux du club donne de la force à cette nouvelle génération qui donne toujours son maximum sur le terrain. Avec seulement 5 défaites sur l’ensemble de la saison de Série B, Chapecoense termine à la première place du championnat et retrouve l’élite du football brésilien. Une revanche et un hommage aux joueurs et membres du club décédés dans l’accident d’avion. Un rêve de courte durée puisque Chapecoense terminera bon dernier avec seulement une victoire et 15 points en 38 matchs. Un bon souvenir qui en amènera d’autres dans les années à venir.

Malgré une situation dramatique, le club de Chapecoense a réussi à revenir sur le devant de la scène et à évoluer avec les meilleures équipes du Brésil. Le maire de la ville l’a précisé : “Le football, ce ne sont pas que 4 lignes sur un terrain avec un ballon. Ce sont des valeurs comme l’amour, la solidarité et la fraternité”. Cette équipe semble donc l’avoir bien compris…

Crédit photo : Márcio Cunha/ACF

Romain Henry

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